Cyclicité de la crise dans le roman abitibien : Jocelyne Saucier, Louis Hamelin, Biz

Abstract

Dans le sillage des théories de Naomi Klein (La doctrine du choc, 2007) et de David Harvey (L’énigme du capital et les crises du capitalisme, 2010), cette thèse analyse les cycles de boom and bust qui caractérisent le capitalisme en général, mais dont les conséquences sont souvent démultipliées dans des contextes de régions marginalisées et donc plus vulnérables comme l’Abitibi. Je retrace les représentations des effets de cette cyclicité économique à travers trois romans qui caractérisent l’Abitibi au cours du siècle dernier : Jeanne sur les routes (2006) de Jocelyne Saucier, Autour d’Éva (2016) de Louis Hamelin et Mort-Terrain (2014) de Biz. En effet, la longue histoire des opérations minières dans la région a produit un contexte idéal pour l’utilisation de récits de crise. Mes recherches mettent l’accent sur les caractéristiques historiques et géographiques de l’Abitibi, notamment sa position frontalière au Québec. Les divers types de distance créés par ces circonstances placent la région en position de faiblesse face aux forces puissantes qui agissent sur elle. Les récits sur la récurrence des crises économiques sont utilisés pour justifier la mise en œuvre de mesures d’austérité au nom d’une plus grande centralisation économique. Dans son ensemble, le corpus dépeint le déclin à long terme de la région tout en soulignant les circonstances particulières des périodes clés. Par ailleurs, chacun des trois romans éclaire une dimension sociopolitique différente. L’univers de Saucier met l’accent sur les considérations de solidarité ouvrière et suggère un parallèle entre idéologie politique et religieuse. Le roman de Hamelin propose des descriptions étoffées de l’environnement naturel et met en scène un conflit entre les partisans du développement touristique et les partisans de la préservation, tandis que Mort-Terrain de Biz met en lumière la façon dont la santé publique est liée aux questions économiques.